Osservatorio delle libertà ed istituzioni religiose

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Osservatorio delle Libertà ed Istituzioni Religiose

Documenti • 4 Novembre 2004

Decisione 10 ottobre 2002, n.34574/97

PREMIÈRE SECTION
DÉCISION
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête no 34574/97
présentée par G.G.
contre l’Italie
La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant le 10 octobre 2002 en une chambre composée de
M. C.L. Rozakis, président,
Mme F. Tulkens,
M. P. Lorenzen,
Mme N. Vajić,
M. E. Levits,
M. A. Kovler,
M. V. Zagrebelsky, juges,
et de M. E. Fribergh, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite devant la Commission européenne des Droits de l’Homme le 5 août 1996,
Vu l’article 5 § 2 du Protocole no 11 à la Convention, qui a transféré à la Cour la compétence pour examiner la requête,
Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT
Le requérant, G.G., est un ressortissant italien, né en 1982. Il est représenté devant la Cour par Me M. Balboni, avocat à Bologne. Le gouvernement défendeur est représenté par son agent, M. U. Leanza, et son coagent, M. V. Esposito.
A. Les circonstances de l’espèce
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
Le 6 novembre 1993, l’Association S.O.S. Telefono Azzurro reçut un appel anonyme qui dénonçait des blessures provoquées à la mineure V.A. de la part des gérants (C.C., E.C. et G.C.) d’un foyer pour enfants abandonnés ou en difficulté, situé près d’Isernia et accueillant, entre autres, le requérant.
Le 12 novembre 1993, les services sociaux furent alertés par ladite Association. Ayant constaté des nombreuses carences du foyer, les services sociaux dénoncèrent C.C., E.C. et G.C. à la police judiciaire.
Le même jour, des enquêtes préliminaires furent ouvertes près le juge d’instance d’Isernia.
Le 30 novembre 1993, les parents de V.A. portèrent plainte contre C.C., E.C. et G.C. auprès du Procureur de la République d’Isernia.
Le 4 décembre 1993, le juge d’instance ordonna la perquisition du foyer, qui fut effectuée le même jour.
A cette même date, le président du tribunal pour enfants de Campobasso ordonna que les enfants fussent placés dans un autre foyer.
Le 27 juin 1994, le juge d’instance fit droit à la demande du Procureur de la République de proroger de six mois le délai pour la clôture des enquêtes préliminaires, en raison de la complexité de celles-ci.
Le 6 septembre 1994, le Procureur de la République cita les gérants du foyer à comparaître devant le juge d’instance d’Isernia. Ils étaient accusés a) de l’infraction de « mauvais traitements en famille ou vis-à-vis de mineurs » (maltrattamenti in famiglia o verso i minori), prévue à l’article 572 § 1 du Code Pénal (« C.P. ») et punie avec la réclusion jusqu’à cinq ans, à l’égard de douze enfants y compris le requérant, et b) de coups et blessures (lesione personale) à l’égard de la mineur V.A., infraction prévue à l’article 582 C.P. et punie avec la réclusion jusqu’à trois ans. Les faits qui leur étaient reprochés étaient les suivants : les enfants accueillis dans le foyer, y compris le requérant, étaient souvent frappés avec une tapette ou un fouet et les frappes augmentaient au fur et à mesure que les enfants s’en plaignaient afin qu’ils apprennent à être des « gagnants » ; les mineurs étaient obligés de nettoyer les étables, de cueillir les noisettes, de s’occuper des animaux ou de faire le ménage de la maison, et ils étaient obligés de continuer jusqu’à ce que le travail ne fût terminé même lorsqu’ils se plaignaient d’être malades ; pendant la nuit les enfants étaient enfermés dans leurs chambres, surveillés par l’un d’eux qui dormait dans le couloir, et il leur était interdit d’appeler les gérants pour se rendre à la salle de bains ; des techniques d’hypnose étaient utilisées pour obtenir l’adhésion des enfants au « programme éducatif » ; les enfants étaient soumis à des pressions et menaces de punitions pour qu’ils se montrent heureux devant les visiteurs et qu’ils ne parlent pas des coups reçus ; les gérants leur décrivaient les assistants sociaux nommés par le tribunal de Campobasso comme étant « méchants » et stigmatisaient le comportement des enfants qui se confiaient audits assistants sociaux afin qu’ils fussent exclus par les autres enfants ; et en général, par leur comportement, les gérants avaient déterminé un véritable état de soumission psychique des enfants et les avaient maltraités.
A l’audience préliminaire qui se tint le 11 juillet 1995, les accusés et le Ministère public s’accordèrent, selon une procédure abrégée régie par l’article 444 du Code de Procédure Pénale (« C.P.P. »), pour qualifier l’infraction reprochée comme « abus de moyens correctionnels et disciplinaires » (abuso dei mezzi di correzione e di disciplina), infraction prévue à l’article 571 C.P., aggravée par les lésions subies par la mineure V.A.. L’accord (patteggiamento) prévoyait en outre que C.C. et E.C. seraient condamnés à 44 jours d’emprisonnement et G.C. à 15 jours d’emprisonnement, la peine étant convertie en une amende de 3 300 000 lires italiennes (ITL) et 1 125 000 ITL respectivement.
Dans son mémoire, le substitut du Procureur de la République souligna que la méthode éducative innovatrice adoptée par les accusés avait sorti des effets parfois positifs, en permettant de contrôler et améliorer les conditions des mineurs, et parfois négatifs, ce qui était démontré par la rancune que la plupart des mineurs avait montré à l’égard des accusés. Les épisodes négatifs s’étaient vérifiés surtout pendant les derniers temps, lorsque les accusés avaient accueilli au foyer plus d’enfants que d’habitude et que plusieurs de ces enfants présentaient des graves problèmes d’adaptation qui leur avaient précédemment empêché de rester dans d’autres foyers pour enfants. Or, les accusés avaient accepté de s’occuper desdits enfants afin de réussir là où d’autres foyers avaient failli, et avaient par la suite perdu de vue les limites de leurs possibilités au point qu’ils refusaient d’admettre d’avoir commis des erreurs dans leurs relations avec les mineurs ; ils expliquaient la rancune des enfants envers eux et les allégations de mauvais traitements comme une réaction à l’éloignement de V.S. du foyer ordonné par le tribunal pour enfants. D’autre part, les accusés avaient insisté pour que les enfants se montrent heureux dans le seul but de promouvoir leur méthode éducative, et n’avaient eu aucune intention lucrative. Le Ministère public concluait qu’il manquait l’élément subjectif permettant de conclure que les accusés avaient « une volonté consciente d’adopter un comportement habituellement vexatoire envers les enfants », même s’il était évident qu’ils avaient abusé des moyens éducatifs en commettant les actes qui leur étaient reprochés.
Par une décision adoptée le même jour, le juge d’instance ratifia l’accord, qu’il considérait comme acceptable aux motifs « qu’il manquait la gravité et la volonté de soumettre les enfants à des mauvais traitements », et « qu’il manquait les éléments pour conclure que les accusés avaient eu la volonté consciente d’adopter envers les enfants un comportement habituellement vexatoire ».
Le 21 juillet 1995, le procureur général auprès de la cour d’appel de Campobasso se pourvut en cassation. Il contestait l’application par le juge d’instance de l’article 571 C.P. nonobstant qu’il s’agissait de moyens correctionnels illicites (utilisation d’un fouet, obligation d’accomplir des tâches humiliantes, hypnose). S’appuyant sur la jurisprudence majoritaire, il faisait valoir que l’utilisation de moyens correctionnels et disciplinaires qui, de par leur nature et pas leurs effets sur les enfants, sont incompatibles avec les fonctions d’éducation, dans des conditions où la sévérité dégénère en vexations et oppression, doit être qualifiée comme mauvais traitements au sens de l’article 572 C.P. et non pas comme abus de moyens correctionnels, et cela indépendamment de la conviction des utilisateurs de ces moyens de poursuivre un but éducatif. Or, l’infraction de mauvais traitements ne peut faire l’objet d’un accord entre l’accusé et le ministère public aux termes de l’article 444 C.P.P..
Par une décision du 16 janvier 1996, déposée au greffe le 11 avril 1996, la Cour de Cassation rejeta le recours et confirma le raisonnement du juge d’instance. Elle estima que, malgré l’existence d’une importante jurisprudence de la même juridiction, la nature illicite des moyens correctionnels et disciplinaires n’était pas suffisante à exclure l’application de l’article 571 C.P., mais qu’il faut examiner si les moyens employés poursuivaient quand même un but éducatif et disciplinaire. Or, en l’espèce les accusés avaient sans doute abusé des moyens en question, mais ils les avaient utilisés dans le cadre d’un programme éducatif qu’ils considéraient innovateur et qui avait fait l’objet de publicité. En tout état de cause, il n’avait pas été prouvé que les accusés avaient consciemment choisi de soumettre habituellement les enfants à un traitement vexatoire.
B. Le droit interne pertinent
La procédure d’application de la peine à la demande des parties (« applicazione della pena su richiesta delle parti ») est réglementée par les articles 444 et suivants C.P.P.
Aux termes de l’article 444 §§ 1 et 2 du C.P.P, l’accusé et le représentant du parquet peuvent demander au juge d’appliquer une peine d’emprisonnement lorsque celle-ci, réduite d’un tiers, n’est pas supérieure à deux ans. Si le juge estime que l’infraction a été correctement qualifiée et que les circonstances de celle-ci ont été prises en compte, il rend un jugement par lequel il applique la peine demandée. Le juge peut refuser l’application de la peine en question lorsque celle-ci n’est pas raisonnable par rapport à la gravité de l’infraction contestée (voir l’arrêt de la Cour constitutionnelle no 313 du 26 juin 1990). Si le juge décide d’appliquer la peine sollicitée, il ne peut pas se prononcer sur la demande en réparation des dommages présentée par la partie civile ; il peut cependant condamner l’accusé au remboursement de frais légaux encourus par cette dernière (voir l’arrêt de la Cour constitutionnelle no 443 du 12 octobre 1990). En se constituant partie civile, la partie lésée peut contester la qualification juridique des faits, le caractère adéquat de la peine proposée et la suspension conditionnelle de celle-ci (voir l’arrêt de la Cour de cassation no 3305 du 1er juillet 1996). La partie lésée peut demander la réparation des dommages subi aux juridictions civiles. Aux termes de l’article 445 § 1 du C.P.P, le jugement appliquant la peine demandée par les parties ne peut pas être pris en compte dans tout autre procès civil ou administratif.

GRIEFS
1. Le requérant se plaint au titre de l’article 3 de la Convention d’avoir été soumis à des mauvais traitements de la part des gérants du foyer où il avait été placé. Il considère en particulier que la qualification par le juge d’instance et, encore plus, par la Cour de Cassation de l’infraction en cause comme « abus de moyens correctionnels et disciplinaires » constitue un encouragement à l’usage de la violence contre les enfants et démontre une grave carence de protection des enfants par l’Etat italien. Il invoque également l’article 8 de la Convention.
2. Le requérant se plaint en outre, au titre de l’article 4 de la Convention, d’avoir été obligé à accomplir un travail forcé.
3. Il se plaint de plus, au titre de l’article 5 § 1 (d), d’avoir subi une privation de liberté illicite.
4. Invoquant l’article 9 de la Convention, le requérant se plaint d’avoir subi de l’hypnose dans le but de le faire adhérer au programme éducatif.
5. Invoquant l’article 13 de la Convention, il se plaint également de n’avoir pu se constituer partie civile dans la procédure entamée contre les gérants du foyer, et cela à cause de l’accord intervenu avec le ministère public. Selon lui, une action devant le juge civil ne lui permettrait que d’obtenir une satisfaction incomplète, étant donné la qualification de l’infraction pour laquelle les gérants du foyer ont été condamnés.

EN DROIT
Le requérant dénonce tout d’abord les mauvais traitements subis lors de son séjour dans le foyer où il avait été placé et considère que la qualification juridique des faits de l’espèce démontre une carence de protection des enfants de la part des autorités nationales.
Le Gouvernement excipe du non-épuisement des vois de recours internes. Le requérant aurait pu, d’une part, se constituer partie civile dans le procès pénal pour réclamer le remboursement des frais de procédure et, d’autre part, s’adresser au juge civil afin d’obtenir la réparation des dommages subis. A ce dernier égard, le Gouvernement rappelle qu’aux termes de l’article 445 C.P.P., le jugement qui applique la peine dans la procédure de patteggiamento « n’a pas d’effet dans le procès civil ou administratif », la qualification juridique des faits « ne peut donc conditionner le montant de l’éventuel dédommagement ». Le fait que « d’autres personnes exerçant l’autorité parentale sur des mineurs victimes des faits en question » aient demandé et obtenu l’aide judiciaire dans le cadre des procédures en dommages-intérêts contre les gérants du centre, démontrerait l’efficacité et l’effectivité des voies de recours prévues en droit interne conformément à l’article 13 de la Convention.
Le requérant conteste la thèse du Gouvernement car les voies indiquées par celui-ci ne seraient ni efficaces ni effectives. La constitution de partie civile ne serait pas appropriée, le juge ne décidant pas sur la demande de ladite partie dans le cas d’un patteggiamento. La procédure en dommages-intérêts ne permettrait pas non plus de remédier à la situation dénoncée – la qualification des faits – mais fournirait un dédommagement qui ne saurait passer pour une réparation adéquate de la violation litigieuse. Le requérant affirme, par ailleurs, avoir décidé d’attendre l’issue des porsuites pénales pour intenter la procédure en dommages-intérêts sur la base de la qualification des faits. Eu égard, toutefois, à l’application, erronée à ses yeux, de la loi, il considère inutile l’épuisement de l’action civile. En citant les arrêts X et Y c. Pays-Bas (du 26 mars 1985, série A no 91) et Stubbings et autres c. Royaume-Uni (du 22 octobre 1996, Recueil 1996-IV), le requérant affirme que la Cour a jugé que « la protection accordée par le droit civil avec l’action en réparation ne peut passer pour adéquate dans les affaires où sont en jeu des valeurs fondamentaux. Dans ces cas, seule la protection pénale peut assurer une prévention efficace ».
La Cour rappelle d’abord que, selon sa jurisprudence, combinée avec l’article 3, l’obligation que l’article 1 de la Convention impose aux Hautes Parties contractantes de garantir à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés consacrés par la Convention leur commande de prendre des mesures propres à empêcher que lesdites personnes ne soient soumises à des tortures ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, même administrés par des particuliers. Les enfants et autres personnes vulnérables, en particulier, ont droit à la protection de l’Etat, sous la forme d’une prévention efficace, les mettant à l’abri de formes aussi graves d’atteinte à l’intégrité de la personne (arrêt A. c. Royaume-Uni du 23 septembre 1998, Recueil 1998-.., § 22).
Dans ladite affaire, la Cour a conclu à la violation de l’article 3 au motif que l’Etat défendeur n’avait pas assuré une protection suffisante aux mineurs contre des atteintes à leur intégrité. Ce constat découlait toutefois de la circonstance
« (…) qu’en droit anglais, pour se défendre contre une accusation de voies de fait sur la personne d’un enfant, on peut arguer que le traitement litigieux constituait un « châtiment raisonnable » (…). Il incombe à l’accusation d’établir au-delà de tout doute raisonnable que les voies de fait ont dépassé les bornes d’un châtiment licite. En l’occurrence, bien que le requérant eût subi un traitement d’une gravité suffisante pour relever de l’article 3, le jury acquitta son beau-père qui lui avait infligé le traitement dont il s’agit (…).
Selon la Cour, la loi ne mettait pas suffisamment le requérant à l’abri d’un traitement ou d’une peine contraires à l’article 3. D’ailleurs, le Gouvernement a concédé qu’en son état actuel la loi n’assure pas une protection suffisante aux enfants et doit être modifiée. »
La Cour relève que le code pénal italien réprime en revanche sévèrement en son article 572 les mauvais traitements infligés, entre autres, aux mineurs. En l’espèce, les juridictions nationales ont, dans le cadre de la procédure abrégée du patteggiamento, appliqué la peine demandée par l’accusé et le représentant du parquet (article 444 C.P.P.) sur la base d’une qualification différente des faits et en appliquant l’article 571. Certes les peines appliquées en l’espèce n’ont pas été trop lourdes, mais il y a lieu de souligner que le juge ne se limite pas à entériner l’accord passé entre accusé et parquet : il peut en revanche refuser l’application de la peine en question lorsque celle-ci n’est pas raisonnable par rapport à la gravité de l’infraction contestée (voir l’arrêt de la Cour constitutionnelle no 313 du 26 juin 1990). La victime de l’infraction a, par conséquent, intérêt à se constituer partie civile, même après la conclusion de l’accord entre l’accusé et le parquet, afin de contester la qualification des faits, le caractère adéquat de la peine proposée et la suspension conditionnelle de celle-ci (voir l’arrêt de la Cour de cassation no 3305 du 1er juillet 1996).
Loin de vouloir spéculer sur la possible différente issue de la procédure en cas de constitution de partie civile du requérant, la Cour observe que ce dernier, de son aveu même, préféra attendre la fin des poursuites pour entreprendre la voie civile en dommages-intérêts, se privant ainsi de la possibilité de présenter ses arguments contre le traitement de l’affaire par la procédure abrégée litigieuse. De plus il n’a pas par la suite entamé la procédure en dommages-intérêts.
En ce qui concerne l’efficacité de cette procédure, dans l’affaire Z. et autres c. Royaume-Uni ([GC] no 29392/95, § 109, CEDH 2001-..) portant notamment sur des mauvais traitements sur des mineurs, la Cour a rappelé, à propos du grief des requérants sur le terrain de l’article 13, que :
« lorsqu’un droit d’une importance aussi fondamentale que le droit à la vie ou l’interdiction de la torture ou des traitements inhumains ou dégradants est en jeu, l’article 13 exige, outre le versement d’une indemnité là où il convient, des investigations approfondies et effectives propres à conduire à l’identification et à la punition des responsables et comportant un accès effectif du plaignant à la procédure d’enquête (arrêt Kaya c. Turquie du 19 février 1998, Recueil 1998-I, pp. 330-31, § 107). Toutefois, les précédents concernaient des meurtres ou des traitements contraires à l’article 3 de nature à engager la responsabilité pénale d’agents des forces de l’ordre. Dans les cas où l’on reproche aux autorités de n’avoir pas protégé des personnes contre les actes de simples particuliers, l’article 13 peut ne pas toujours impliquer pour les autorités l’obligation d’assumer la responsabilité d’enquêter sur les allégations. En revanche, la victime ou sa famille doit disposer d’un mécanisme permettant d’établir, le cas échéant, la responsabilité d’agents ou organes de l’Etat pour des actes ou omissions emportant violation des droits consacrés par la Convention. Par ailleurs, lorsque la violation concerne les articles 2 ou 3, qui comptent parmi les dispositions les plus fondamentales de la Convention, une indemnisation du dommage moral découlant de la violation doit en principe être possible et faire partie du régime de réparation mis en place. »
Elle a ensuite conclu à la violation de l’article 13 en raison de ce que :
« en l’espèce les requérants n’ont disposé ni d’un moyen approprié de faire examiner leurs allégations selon lesquelles l’autorité locale avait failli à les protéger d’un traitement inhumain et dégradant, ni d’une possibilité d’obtenir une décision exécutoire leur allouant une indemnité pour le dommage subi de ce fait. Par conséquent, ils ne se sont pas vu offrir un recours effectif pour dénoncer le manquement à l’article 3 (…) » (ibidem, § 111).
Mutatis mutandis, dans l’affaire Stubbings et autres précité, contrairement à ce que le requérant affirme, la Cour a conclu à la non-violation de l’article 8 en raison de ce que cette disposition :
« n’exige pas nécessairement que l’Etat observe son obligation positive d’assurer le respect de la vie privée en offrant des voies de recours au civil illimitées lorsqu’il existe des sanctions pénales. »
Il ressort à l’évidence de ces deux arrêts, que la voie pénale ne constitue pas le seul recours efficace dans ce type d’affaire, mais qu’une procédure civile, permettant d’obtenir une réparation des dommages subis, doit en principe être ouverte aux mineurs victimes des mauvais traitements. Or en l’occurrence, les poursuites pénales ont comporté la condamnation des gérants du foyer dans lequel le requérant avait été placé et la voie civile (constitution de partie civile et procédure en dommage intérêts) n’a pas été entreprise par le requérant.
A la lumière de ce qui précède, la Cour estime que le droit interne italien garanti une protection adéquate, sous forme de prévention, contre d’éventuelles atteintes à l’intégrité des mineurs. Le requérant n’ayant pas épuisé les voies de recours internes, la requête doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Déclare la requête irrecevable.

Erik Fribergh Christos Rozakis
Greffier Président